Guides Pratiques de la Smart City : Comment sont-ils conçus?

En 2017, le Smart City Institute publiait son tout premier Guide Pratique. Depuis, plusieurs tomes sont venus enrichir ce que nous appelons aujourd’hui notre collection de Guides Pratiques. Chaque ouvrage s’intéresse à une thématique spécifique allant de la Participation citoyenne au Monitoring et à l’évaluation, mais s’inscrit toujours dans le cadre des dynamiques de transition durable et intelligente de nos territoires.

Audrey Lebas, chercheuse au Smart City Institute, est l’auteur des trois derniers opus :

• La mobilité de demain : Quels enjeux pour nos territoires ? (2020)
• Monitoring et évaluation : Outil de gestion pour nos territoires en transition (2021)
• Collaborations et partenariats public-privé : Leviers de transition pour nos territoires ? (2022)

Les Guides Pratiques abordent, à chaque fois, un sujet spécifique. Comment la thématique est-elle identifiée ? Par ailleurs, à quel(s) besoin(s) s’adresse ce 6ème Tome ?

De manière générale, on essaie de faire remonter les besoins du terrain grâce à deux leviers : l’observation des tendances (via la recherche, les événements, les réseaux sociaux, etc.) et les échanges avec les acteurs de terrain. 

En ce qui concerne ce dernier guide, on a ressenti – par le biais des moyens que je viens d’évoquer -que les territoires éprouvaient des difficultés à savoir quel rôle les acteurs privés pouvaient occuper dans leur démarche de transition durable et intelligente en dehors de simple prestataires de services. Par ailleurs, les organisations publiques et les acteurs privés n’ont pas forcément les mêmes codes (modes de fonctionnement, temporalités, etc.), mais ils n’ont pas non plus toujours une bonne connaissance/compréhension des processus et des fonctionnements l’un de l’autre.

Néanmoins, ce Guide, même s’il sera utile aux acteurs du secteur privé, a davantage pour but de donner des clés au secteur public afin d’identifier des pistes de réflexion pour travailler avec le secteur privé et non l’inverse.

Ce Guide s’adresse donc uniquement au secteur public ?

Non, pas seulement. A travers chacun de nos Guides, on s’adresse évidemment aux organisations au sens large et plus particulièrement aux territoires. Dans ce cas précis, j’irai même jusqu’à dire qu’on s’adresse même encore plus spécifiquement aux territoires qui disposent de moins de ressources (humaines et financières). Cependant, tous les acteurs, qu’ils soient issus du secteur public ou du secteur privé, pourront trouver des pistes de réflexion et des informations qui leur seront utiles dans le cadre du développement d’une dynamique Smart City.

Je précise tout de même que l’idée n’est pas de fournir une solution « clé en main » pour mettre en place une collaboration ou un partenariat public-privé, mais plutôt de présenter et expliquer les types de relation qui peuvent exister entre les deux secteurs lorsqu’on parle de démarches Smart City.

Une fois que le sujet du Guide Pratique est défini, peux-tu nous dire quelles sont les grandes étapes clés de sa rédaction ?

Dans un premier temps, je me nourris principalement de contenu sur le sujet afin de découvrir la thématique au travers de toutes les sources à ma disposition. Je vais notamment m’intéresser à la littérature scientifique existante, aux rapports d’organisations publiques ou privées que je peux trouver ou à d’autres articles pertinents. Je vais aussi échanger avec les acteurs du terrain sur le sujet, notamment durant des conférences ou au travers de visio-conférences.

Une fois que je me suis bien imprégnée de la thématique et des enjeux qui y sont liés, j’élabore une première structure que je vais tester et valider auprès de mes collègues.

Lorsque l'on estime que la structure est suffisamment claire et aboutie, j’approfondis mes recherches afin de pouvoir entamer la rédaction d’une première version. C’est alors un processus de relectures et de corrections qui démarre puisque je réalise en général quatre versions qui sont relues par l’équipe mais aussi d’autres acteurs afin d’arriver à la version finale qui est mise en page et publiée. Une fois que j’entame la rédaction, je sais que c’est un processus en continu et que le contenu va s’enrichir au fur et à mesure des échanges, notamment pour les bonnes pratiques. 

Des experts sont-ils consultés afin de constituer le contenu des Guides Pratiques ? Le cas échéant, était-ce le cas aussi cette année ?  

Oui, chaque année, le Guide Pratique est relu par nos contacts à l’Agence du Numérique (AdN) et au sein du SPW qui nous envoient leurs retours s’ils en ont.

En plus de ces relectures, on essaie, lorsque c’est pertinent, de valoriser l’expertise d’autres acteurs en collaborant avec notre écosystème. Il est arrivé, par exemple, que certains experts rédigent un chapitre ou une section de chapitre. Cela a été le cas notamment de Jacques Teller, Professeur d’urbanisme à l’Université de Liège ou de FuturoCité qui avaient contribué, respectivement, aux quatrième et troisième tomes.

Dans ce nouvel ouvrage, nous avons pu compter sur plusieurs relectures de Matthieu Lambert, qui est juriste expert à la Cellule Marchés publics de l’UVCW mais aussi de Raphael Schneider, Conseiller juridique à la Cellule d’Informations Financières (CIF-Walcom) de la Région Wallonne.

Vu le travail conséquent que représente la rédaction d’un tel ouvrage, on imagine que les défis rencontrés sont nombreux. Quels sont ceux auxquels tu as été confrontée cette année ?

Cette année, j’ai fait face à deux grands défis. Le plus conséquent a été que ce Guide Pratique implique davantage d’aspects juridiques que les précédents. Il a fallu trouver le juste milieu entre être trop général – et donc risquer de donner des informations incomplètes ou incorrectes – et ne pas trop rentrer dans les nuances juridiques.

Le second concerne surtout la difficulté de trouver des sources qui s’appliquent à la réalité wallonne. En effet, les termes, les éléments constitutifs ainsi que les contextes législatifs relatifs aux collaborations et particulièrement aux partenariats public-privé sont différents selon le pays et le continent dans lequel on se trouve. On peut donc difficilement extraire du contenu tel quel dans des sources et recherches réalisées par et pour des acteurs étrangers.

Avant de conclure cette interview , peux-tu nous dire ce que toi, en tant que chercheuse, tu retires de la réalisation de ce 6ème Guide ?

J’ai appris énormément de choses lors de la rédaction de ce Guide Pratique. Cependant, il me semble important de dire que, bien que les collaborations et partenariats public-privé (PPP) représentent de belles opportunités pour les territoires, ce sont des processus complexes. Par ailleurs, les PPP ne conviennent pas à tous types de projets.

Cependant, au vu du contexte budgétaire serré de certains (petits) territoires, il peut être opportun de réfléchir à davantage développer ce type de collaborations et partenariats dans le futur afin de progresser dans leur démarche Smart City.

Comment ce guide permet-il, justement, d’aider les lecteurs à mieux appréhender ce sujet complexe ?  

Dans ce guide, je me suis vraiment efforcée de démystifier ces concepts perçus, à juste titre, comme plutôt complexes. Différents modèles de collaboration et de PPP sont expliqués de manière à bien en cerner les tenants et aboutissants.

Par ailleurs, il propose de nombreuses bonnes pratiques observées à l’étranger qui peuvent être adaptés à l’échelle wallonne et ce, malgré les contextes différents d’un pays à l’autre. Je rappelle que l’idée était de proposer des pistes de réflexion et non des modèles « clé en main ».

Découvrir le Guide Pratique #6